Les fidèles Auditeurs de Music 4 All se rappellent peut-être mon coup de gueule du 16 mars dans lequel j'enfonçais une porte ouverte en l'intitulant "La guerre rend Con !".

J'y évoquais le décision de l'orchestre de Cardiff de déprogrammer le compositeur russe, TchaÏkovski, pour cause de guerre en Ukraine et en soulignait l'incroyable ineptie de cette décision.

Mais qu'on se rassure, dans notre beau pays des Lumières nous avons quelques têtes d'ampoules qui portent un regard éclairé sur la Culture, sur courant alternatif.

Alors aujourd'hui (et ça me démangeait depuis le début mars) je pousse une nouvelle gueulante mais surtout je partage un très grand moment de musique en forme d'hommage au maestro russe Tugan Sokhiev.

Né à Saint Pétersbourg, ce jeune chef d'orchestre quadragénaire se fait très vite remarquer par la critique et sa carrière s'internationalise, de Saint Pétersbourg à Toulouse, en passant par Londres, Madrid ou encore Berlin.

La ville de Toulouse le nomme d'abord premier chef invité et conseiller musical, puis directeur musical en 2008. Il continue sa carrière internationale comme chef principal de l'Orchestre Symphonique de Berlin et sera nommé directeur musical du Bolchoï de Moscou en 2014.

Mais l'ouverture du conflit russo ukrainien va rebattre les cartes pour cet homme qui vit pour son art. Onze jours après, le maire LR de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, qui  le somme ni plus ni moins de s'exprimer sur le sujet, ce dont l'édile se défend la main sur le cœur :

J’ai toujours pensé, comme Tugan Sokhiev, que l’art et la musique en particulier, sont des langages universels, permettant de rapprocher les peuples. [...] Aussi, nous n’avons jamais attendu ou, pire, exigé de Tugan qu’il fasse un choix entre son pays natal et sa ville de cœur, Toulouse.
Cela n’aurait eu aucun sens. Pour autant, il était impensable d’envisager qu’il reste silencieux face à la situation de guerre, tant vis-à-vis des musiciens que du public et de la collectivité. Ce soir, je prends acte que le seul parti qu’il prend, en conscience et connaissance de cause, est celui de la musique.

Un communiqué tout en contradiction démago...

C'est très logiquement que Tugan Sokhiev choisit la seule option que lui laisse l'édile : il démissionne de son poste. Logique jusqu'au bout, il démissionne également du Bolchoï.
Il s'en explique dans un long message dont voici un extrait :

Je sais que beaucoup de gens attendaient que je m’exprime. Il m’a fallu du temps pour traiter ce qu’il se passe et comment exprimer ces sentiments complexes que les événements actuels ont provoqués en moi [...]
Tout d’abord, j’ai besoin de dire la chose la plus importante : je n’ai jamais soutenu et je serai toujours contre tout conflit, sous quelque forme que ce soit. Remettre en question mon désir de paix et penser que moi, en tant que musicien, je pourrais soutenir autre chose que la paix sur notre planète, est choquant et offensant[...]
Au cours de divers événements géopolitiques catastrophiques auxquels notre humanité a fait face au cours des vingt dernières années de ma carrière, je suis toujours resté avec mes collègues musiciens. Et nous avons toujours, ensemble, montré et exprimé du soutien et de la compassion pour toutes les victimes de ces conflits. C’est ce que nous, les musiciens, faisons. Nous exprimons les choses avec de la musique. […] Nous avons la chance de pouvoir parler cette langue internationale qui peut parfois exprimer plus que tous les mots connus de la civilisation.

L'édile de la Ville rose (jumelée avec la capitale ukrainienne Kyiv) a remporté une immense victoire ¿
Il a sacrifié l'Art sur l'autel de la petite politique politicienne en arguant d'une demande du l'orchestre et du public qu'ils n'ont pas demandée, comme en témoigne cette déclaration des musiciens de l'Orchestre du Capitole.
Il prive sa ville d'un chef d'orchestre talentueux qui voit la musique comme un pont entre les peuples.

C'est le type même d'attitude qui justifie le discours de Poutine à propos du clivage avec l'Occident, sans que ça fasse taire les canons. Et qui montre que la Culture est une chose trop sérieuse pour la laisser aux seuls mains des politicards.
Au fait, que fait la ministre de la Culture ???

Certes, ce n'est pas le Nouvel An. Mais qu'importe !

Le talent est intemporel, apatride et universel.
Ce concert est un pur moment de bonheur que je ne pouvais pas garder pour moi toute seule.
Spasiba Maestro !

De 3:22 à 08:18 : Piotr Ilitch Tchaïkoski - La belle au bois dormant op. 66a
De 8:52 à 17:32 : Alexandre Borodine - Dans les steppes de l'Asie Centrale
De 18:20 à 21:35 : Georges Bizet - L'arlesienne, suite n°2 : farandole
De 22:08 à 29:40 : Camille Saint-Saens - Samson et Dalila, Bacchanale
De 30:20 à 40:04 : Johann, Jr Strauss - Rosen aus dem Süden, op. 388
De 40:38 à 44:46 : Edward Hagerup Grieg - Peer Gynt, suite n°1 : morgenstemming
De 45:00 à 47:27 : Edward Hagerup Grieg - Dans l'antre du Roi de la montagne
De 47:52 à 57:16 : Giacomo Rossini - La pie voleuse, ouverture
De 57:48 à 1:03:54 : Edward Elgar - pomp and circumstance n°1
De 01:04:21 à 01:06:58 : Johann, Jr Strauss - Trish Trash Polka
RAPPEL :
De 01:09:49 à 01:12:07 : Johan, Jr Strauss - Pizzicato Polka
De 01:12:42 à 01:15:09 : Johan, Jr Strauss - Radetzky March